Les deux pôles du même

Hubert Benoit, qui s’est intéressé en son temps au zen, a évoqué la manière dont l’esprit éveillé fonctionnait. Il l’a comparé à un pendule oscillant régulièrement entre deux pôles. Il compare au contraire l’esprit de l’adepte en recherche de l’éveil à un pendule en fer qui serait attiré et se collerait alternativement et plus ou moins longtemps à l’un d’entre eux, comme si ces deux pôle étaient des aimants auxquels ils se fixerait ; donc une fois à l’un, une fois à l’autre, sur une période définie.
Deux principes résident concomitamment, ils pourraient se distinguer par l’existence d’une part d'une sphère organique à laquelle appartient toute chose pouvant être perçue par les cinq organes des sens, et d’autre part d'une sphère inorganique, sphère des pensées. Tout l’enjeu semblerait nous révéler la métaphore d’Hubert Benoit, serait de trouver l’équilibre perceptif entre ces deux pôles, à savoir de les unifier afin de s’harmoniser au sein de cette dualité. On devra comprendre que tant que cette dualité s’exprimera en termes antagonistes, l’humain ne pourra pas avoir accès à sa véritable nature qui justement est constituée par ces deux principes. Il est aussi faux de dire que la sphère organique et que la sphère inorganique sont une seule chose que de dire qu'elles sont deux. En effet, il y a bien deux principes, mais ces deux là concourent à définir une seule et même chose, à savoir la perception consciente : ces deux principes définissent donc sa nature. Je ne peux pas évoquer l’existence des pensées sans automatiquement parler de ce qu’elles ne sont pas, à savoir la sphère organique. Mais lorsque je dis que les pensées ne sont pas la sphère organique ce n’est pas pour dire qu’il existe deux mondes séparés, c’est pour dire que ce monde qui est là est constitué au sein de mon vécu, par ces deux choses. Et si je les distingue, ce n’est pas pour les dissocier irrémédiablement mais pour introduire l’idée de complémentarité.
Il est intéressant de considérer la manière dont Hubert benoit définit l’esprit de celui qui serait comme un pendule collant alternativement à un pôle ou à l’autre, car en soi cette image définit bien la manière dont on pourrait se situer sur un pôle pour en exclure l’autre, que ce soit en disant que je ne suis que pensées, ou bien en rejetant les pensées pour ne s’intéresser qu’à la sphère organique, ou bien encore que ce soit pour exclure l’existence de ces deux principes dans un élan consistant à occulter leur complémentarité au profit d’une union artificielle cherchant à évincer cette double nature. Aucune véritable stabilité ne pourra être trouvée sans cette capacité à intégrer profondément ces deux principes. L’union qui nous est ventée ne signifie pas une dissolution de cette hétérogénéité, mais sa pleine et totale intégration.

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Taijitu